Épinard 🌳#44 - L'avenir est dans le sol
En finir avec une agriculture émettrice nette de CO2
Hello 🌳
Il y a quelques semaines je vous parlais des verrous de l’agriculture et de comment on en était arrivé au modèle actuel.
Un modèle qui a poussé le secteur à bout : exploitations intensives en monocultures, appauvrissement des sols et vieillissement des acteur·ices.
Le tout en contradiction avec les enjeux environnementaux actuels.
Mais si je vous disais que l’agriculture peut non seulement limiter son impact mais devenir une véritable solution face aux enjeux environnementaux ? Si, si je vous le promets.
Comment ?
En revalorisant les sols qui sont de véritables mines d’or lorsqu’il s’agit de stocker le CO2.
Eh oui ! Une des activités humaines considérées comme parmi les plus émettrices de gaz à effet de serre est également un levier des plus importants pour lutter contre le réchauffement climatique.
Aujourd’hui on va parler :
Du rôle du sol dans le stockage carbone.
De l’initiative 4 pour 1 000.
Des solutions à mettre en place à son échelle quand on n’est pas agriculteur·ice.
Avant d’aller mettre les mains dans la terre, laisse-moi te rappeler que ce jeudi 6 juin à 12h30, c’est la masterclass “comment construire un plan d’investissement durable ?” avec LITA.co. Il y a déjà plus de 600 inscrits, alors réserve ta place 👇
Let’s Go !
Gaël
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L’agriculture récolte aujourd’hui ce qu’elle sème
Il faut le rappeler, le secteur agricole est la deuxième source d’émissions de gaz à effet de serre en France avec 85 millions de tonnes équivalent dioxyde de carbone émises en 2018. Elle arrive juste derrière le secteur du transport avec 19 % du total des émissions à l’échelle du pays. Ça fait beaucoup.
Si en immobilier, il y a 3 choses importantes : le lieu, le lieu, le lieu En agriculture, il y en a aussi 3 : le sol, le sol, le sol.
Au niveau mondial, les actions néfastes sur le sol relâchent plus 300 millions de tonnes de carbone par an. La faute à la déforestation, au retournement des prairies mais aussi au drainage de tourbières et de zones humides.
Appauvrir les sols ce n’est pas seulement mettre en jeu la sécurité alimentaire avec des productions plus faibles, c’est aussi subir les aléas climatiques de plus en plus extrêmes et participer au réchauffement climatique. En plus, c’est un cercle vicieux : plus le réchauffement climatique se fait ressentir et plus il impacte l’érosion des sols.
Le sol, le sol, le sol !
Si on connaît souvent la première partie du cycle du carbone sur terre : une plante qui pousse capte du CO2. Les plantes récupèrent environ 30% du CO2 émis par les activités humaines…
On connaît moins bien la fin : le sol capte le carbone quand la plante meurt.
Si on pense souvent aux forêts et donc aux arbres quand on parle de “puits carbone” en réalité, c’est surtout les sols qui sont importants.
Et ça stock plutôt bien, puisque les sols mondiaux contiennent 2 à 3 fois plus de carbone que l’atmosphère.
Oui, ça fait beaucoup !
Pour comprendre, il faut se pencher un peu sur ce qu’est un sol. C’est le moment, c’est pas sorcier de cette newsletter. Alors Jamy ?
Vous marchez tous les jours dessus mais savez-vous vraiment de quoi il est composé ?
Le sol contient :
de la matière minérale comme du sable, de l’argile, des débris de roche
des êtres vivants et micro-organismes. Coucou les lombrics.
de la matière organique, fabriqué par les êtres vivants, composée à 50 % de carbone
Ainsi quand une plante pousse, elle va construire de la matière organique sous forme de tige, de feuilles etc. Et lorsqu’elle meurt, cette matière organique riche en carbone sera “digéré” par les organismes vivants présents dans le sol. Le CO2 que la plante a aspiré via la photosynthèse pour grandir, se retrouve donc dans le sol sous forme de matière organique. Et c’est cette même matière organique qui viendra nourrir la génération suivante de plantes.
C’est pour cette raison que l’on crée un véritable cercle vertueux lorsqu’on prend soin de nos sols. Car plus ces derniers auront de matières organiques pour se nourrir, plus il se développera une diversité biologique et plus les terres seront fertiles et pourront jouer leur rôle.
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Quand on parle transition agricole et investissement, difficile de passer à côté de Miimosa.
Avec près de 100 millions d’euros investis sur cette plateforme depuis 2019, c’est plus de 550 projets qui ont pu être financés.
Les projets proposés participent tous au même objectif : financer l’agriculture et l’alimentation de demain. Que ça soit en finançant des ateliers de transformation à la ferme, des projets d'élevage respectueux des animaux, de la viticulture durable jusqu’au financement de projets d’énergie renouvelable.
Pour les investisseurs, les opportunités de rendement sont comprises entre 6% et 10% en fonction des projets*, s'articulant autour de 4 grandes thématiques permettant de diversifier son portefeuille :
Les énergies renouvelables agricoles (solaire sur hangar, méthanisation…)
Financement de coopératives ou entreprises agroalimentaires
Financement d’exploitations agricoles ou d’artisanat alimentaire (brasserie, torréfacteur…)
les Startups agritech ou foodtech
Alors pour soutenir les agriculteurs-rices locaux dans leurs efforts de transformation et pour promouvoir des pratiques agricoles durables, rdv sur Miimosa :
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Agroécologie et changement de modèle
Mais c’est la transformation en profondeur des méthodes agricoles qui permettra au sol de stocker plus de carbone.
Pour cela différentes pratiques sont à favoriser pour mettre en place ce qu’on appelle l’agroécologie.
Qu’est-ce que c’est exactement ?
C’est une agriculture respectueuse des hommes et de l’environnement qui s’appuie sur les écosystèmes pour travailler avec plutôt que contre. On cherche à réduire son impact et ses émissions de CO2 tout en préservant au maximum les ressources. Le tout sans mettre de côté les enjeux sociaux à savoir l’autonomie des populations avec des revenus décents et une mise en avant du collectif pour travailler.
Pour revenir les mains dans la terre, cela veut dire :
Faire des rotations de cultures pour ne pas puiser les mêmes éléments à outrance.
Limiter le travail du sol et avoir un couvert permanent avec du paillage, par exemple, pour éviter les pertes de carbone.
Miser sur des cultures intermédiaires et des cultures enherbées.
Favoriser la biodiversité du sol avec des engrais naturels comme le fumier ou le compost.
Restaurer les sols dégradés.
Planter des arbres et des légumineuses pour fixer l’azote.
Planter des haies pour protéger et enrichir les sols en carbone mais aussi réduire le stress hydrique et créer des abris naturels pour les animaux d’élevage et la biodiversité.
Miser sur l’agroforesterie et la polyculture sur une même culture sans mettre de côté les animaux.
Différents types d’agriculture respectent plus ou moins ces principes comme l’agriculture biologique et ses intrants naturels ou encore la permaculture qui vise à cultiver en harmonie avec les écosystèmes existants en respectant les processus naturels.
Et l’élevage là-dedans.
D’ailleurs, oui, juste au-dessus je vous ai parlé d’animaux. Vous avez l’œil.
Aujourd’hui, l’élevage est décrié pour de très nombreuses raisons. Entre le bien-être animal complètement mis de côté et le côté intensif qui entraîne de nombreux problèmes de santé animale mais aussi la pollution des sols, de l’eau et des émissions de gaz à effet de serre monstrueuses, l’élevage actuel ne peut continuer à exister tel quel.
Mais repenser l’élevage à une échelle humaine et en synergie avec les cultures végétales (céréales, légumineuses, légumes…) pourrait être une manière de rendre l’ensemble plus vertueux. L’important reste de créer une boucle transformatrice où l’azote et le carbone ne sont plus en déséquilibres.
Comme toujours, ce sujet est loin d’être trivial et je vous invite grandement à lire l’article de FEVE, Élevage et environnement : cercle vicieux ou vertueux ?
L’initiative 4 pour 1 000 : prendre le problème en bas pour lutter contre le réchauffement climatique
Je ne pouvais pas vous parler de stockage de CO2 dans les sols sans vous parler de ce projet.
C’est en mars 2015, lors de la COP21 que l’ancien Ministre de l’Agriculture présente cette initiative maintenant soutenue par 300 États, établissements de recherche, ONG, organisations agricoles et banques.
Pas mal pour un projet “écolo”.
Pour compenser l’augmentation nette des émissions de CO2 actuelles, on s’est rendu compte qu’il fallait augmenter le stockage de CO2 dans les sols de 0,4 % soit 4 pour 1 000 - d’où le nom du projet.
Réduire les émissions de GES ne suffit donc plus. Il faut également mettre en place des actions séquestrantes. Et augmenter le stockage dans les 30 premiers centimètres du sol pourrait arrêter complètement l’augmentation de la quantité de CO2 dans notre atmosphère.
Oui, oui. Ça ne veut pas dire qu’on est sauvé et que tout le monde peut aller faire 5 tour du monde en jet. C’est juste un moyen de vivre en restant dans les limites planétaires (cf le concept du donut).
Mais cette initiative 4 pour 1 000 a aussi pour objectif de faire face à :
La sécurité alimentaire. Sans changement profond, il paraît difficile de nourrir 9,5 milliards de personnes d’ici 2050.
L’adaptation des systèmes agricoles face aux changements climatiques et aux aléas de plus en plus extrêmes.
Les acteurs privés et publics travaillent conjointement pour aider les pratiques d’agroécologie qui répondent à cette initiative de stockage carbone à se déployer à grande échelle. Parce que les effets se font ressentir de manière immédiate mais surtout sur le long terme. L’accumulation de carbone dans le sol se poursuit 20 à 30 ans après la mise en place des bonnes pratiques si ces dernières continuent ne sont pas stoppées.
💡 Et c’est aussi de cette initiative que vient l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) qui déplaît tant aux promoteurs immobiliers.
Alors, où est-ce que ça en est presque 10 ans après le début ?
Les études d’état des lieux sont encore rares mais elles existent.
Le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique (CIRAD), l’Institut National de Recherche Agronomique (INRAE) et l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) ont publié le 1er mars 2023 un état des lieux de l’initiative 4 pour 1 000 dans les pays d’Outre-Mer.
On y découvre que :
Les territoires ultramarins stockent l’équivalent de 20 % du carbone contenu dans les sols de France métropolitaine, malgré le fait qu’ils ne recouvrent que 15 % de la superficie de l’Héxagone.
De 0 à 1m de profondeur, le carbone stocké se mesure à :
Pour les sols de Guyane : environ 900 millions de tonnes de CO2 #Merci les forêts tropicales
Pour les sols de la Réunion : environ 7,6 MtCO2
Pour les sols de la Martinique : environ 6,5 MtCO2
Les sols de la Métropole sont évalués à 4 684 MtCO2
Bien évidemment, la nature des sols n’est pas la même et c’est un critère non négligeable à prendre en considération.
Les sols rouges de Guyane stockent environ 130 tC02/ha
Les sols de la France métropolitaine stockent environ 35 à 80tCO2/ha
Quoi qu’il en soit, les efforts doivent se déployer à une plus grande échelle pour faire basculer le système agricole actuel afin qu’il ne soit plus à l’origine du problème mais acteur d’une solution pour lutter contre le réchauffement climatique.
Comment agir à mon échelle si je ne suis pas agriculteur·ice ?
Au niveau perso : Déjà, si vous avez un bout de terrain, vous pouvez essayer de cultiver un potager en suivant certains principes de l’agroécologie.
Vous pouvez aussi voter le 9 juin prochain lors des Européennes pour élire les membres du Parlement européen en faveur des changements au niveau de l’agriculture.
Et bien sûr manger des légumes et des fruits cultivés localement avec une attention portée sur la biodiversité des sols.
Au niveau investissement :
Certains investissements facilitent la transition des agriculteurs vers des modèles agroécologiques.
Un des premiers freins à l’installation d’un agriculteur est l’achat des terres agricoles.
Et comment espérer faire une transition si on ne peut même pas s’installer.
Pour y répondre, les foncières agricoles comme FEVE, Terre de liens ou Terrafine font appel à l’épargne citoyenne, pour faire l’acquisition des terres qui sont ensuite louées. Et cerise sur le terrain, les locataires doivent justement mettre en place des pratiques agroécologiques.
Au-delà de la terre, il est possible d’investir dans tous types de projets liés à l’agriculture, que ce soit en finançant directement les agriculteur-ices, les coopératies ou même des startup qui innovent dans le secteur.
De nombreux projets passent sur les plateformes de financement participatif comme Miimosa (qui sponsorise cette édition) ou encore LITA.co.
Il existe également quelques fonds de capital-risque dédiés à ce sujet mais ils sont souvent accessibles qu’à partir de 100k€ (pas vraiment grand public donc…).
Au niveau de votre entreprise :
Si votre entreprise est acheteuse de crédits carbones, alors autant qu’ils soient vraiment utiles localement.
C’est le créneau pris par Agoterra et Regeneration qui permettent de financer les agriculteurs, et ainsi limiter les risques financiers durant leur transition vers un modèle agroécologique.
Conclusion
J’espère qu’après avoir lu cette édition vous regarderez le sol en pensant à un superbe aspirateur à carbone (j’assume de t’avoir mis cette image dans la tête) et que vous comprenez un peu mieux l’impact considérable qu’un changement de pratique agricole peut avoir sur l’environnement.
D’ailleurs, très bon film aborde ce sujet : Kiss the Ground (dispo sur Netflix). C’est un peu à l’américaine mais très captivant.
J’espère que cette édition t’a plu. Fais-le moi savoir, juste en dessous 👇
Perso, comme toujours avec l’agriculture, j’apprends plein de trucs.
On se retrouve dans deux semaines pour une nouvelle édition.
PS 1: Si tu souhaites être accompagné(e) dans tes investissements, réserve une consultation ici
PS 2 : Toutes les éditions précédentes sont dispos ici.
👋
Gaël 🌳
⚠️ Et pour finir : Je voudrais te rappeler qu’ici tu ne trouveras pas de conseils d'investissement ni de recommandations personnalisées. Ces informations sont impersonnelles, uniquement à but informatif et pédagogique et ne sont pas adaptées aux besoins d'investissement d'une personne spécifique.Tu dois aussi garder en tête qu’investir dans des actifs cotés ou non cotés comporte un risque de perte partielle ou totale des montants investis ainsi qu'un risque d'illiquidité.Et enfin, le traitement fiscal d’un investissement dépend de la situation individuelle de chacun. Souviens-toi que les performances passées ne préjugent pas des performances futures.
Merci pour ce super article super bien vulgarisé.
Petite correction
Les sols de la France métropolitaine stockent environ 35 à 80tCO2/ha
Ce sont des stock de Carbone "pur" (C) et non de CO2
Cela représente 130 à 300 t de CO2 /ha
Super édition ! L’agriculture, le sujet qui touche tout le monde, du plus pauvre au plus riche et qui continuera de toucher tout le monde, du plus pauvre au plus riche tant qu'il y aura de la vie humaine. Comment ne pas le mettre au centre des discussions, des apprentissages et du quotidien des personnes lorsqu'on souhaite des transformations profondes de la société ? (Question rhétorique) C'est impossible, donc merci d'en avoir parler !